Par Marie-Hélène Proulx, M. en sexologie et fondatrice du Portail Immersion
Derrière le désir d’aller au front, il y a toute une histoire : celle d’une destinée personnelle où se sont forgées des peurs et des valeurs profondes, mais une histoire d’amour aussi, avec ses désirs d’entraide et ses limites. Souvent, cette histoire est tellement ancrée dans ce que l’on est que l’on a du mal à y mettre des mots, et encore plus à en envisager la suite, lorsqu’autant d’éléments demeurent incertains. Comment alors, dans cet univers inconnu, trouver les paroles pour se soutenir?
L’intimité secrète des héros
Déjà, au départ, un grand néant qui étonne. Depuis les guerres de clans de nos ancêtres néandertaliens jusqu’à celle du Golfe, en passant par les pompiers qui font leurs bagages toutes les semaines pour aller séjourner à la caserne, les personnes prêtes à aller au front n’ont pas manqué à l’appel. Pourtant, il semblerait qu’à travers les siècles, ceux qui les aiment et restent derrière eux soient tombés dans l’oubli.
En effet, les chercheurs se sont penchés à maintes reprises sur les moyens de maintenir la santé mentale de ceux qui la risquent chaque jour en allant affronter les périls d’une quelconque première ligne. Le soutien du partenaire et la famille aimante y figurent parmi les facteurs de protection. La chercheuse en psychologie Nafissa Ismail affirme que le fait d’avoir quelqu’un d’autre à ses côtés contribue de façon tangible et maintes fois mesurée à réduire le cortisol dans le sang et d’autres hormones directement liées à l’état de stress qui peut épuiser le système à long terme : « Parce que c’est de savoir qu’il y a quelqu’un qui est là à nos côtés, de pouvoir communiquer et partager. Le toucher aussi, c’est une façon de communiquer qui est très fondamentale chez l’humain : ça aide à diminuer le stress et l’anxiété. Alors c’est sûr que lorsqu’on a un partenaire, ça fait une grosse différence. Pour ceux qui n’en ont pas, il faut alors compenser par un côté social, avoir des amis et les moyens de communication, bien qu’il n’y ait pas de conjoint ou de conjointe dans le portrait. »
Pourquoi alors, ne s’est-on pas davantage attardé à ce qui fait qu’une famille continue, malgré ses peurs, de trouver la force d’offrir son soutien?
« Avant, pendant les guerres, c’était toujours à l’extérieur. Le risque était donc moins perçu comme une réalité et comme un risque pour les vies de l’entourage et pour notre confort. » Mircea Vultur chercheur en sociologie du travail de l’INRS
Pourtant, maintenant, Joseph comme d’autres conjoints de nos héros d’aujourd’hui, vit cette réalité de plein fouet. Bien avant que la situation dans les CHSLD soit médiatisée, il se souvient d’avoir vu son conjoint en revenir avec ses doutes quant à la présence ou à l’efficacité des équipements, ou encore sur l’ampleur de l’épidémie à venir.
Il était une fois… l’incertitude
Contrairement aux conjoints qui les accompagnent, les personnes au front ont souvent bien d’autres priorités à gérer que leur anxiété : « Je crois que ma bonne oreille est un élément qui est aussi très important. J’ai senti plus d’anxiété la première journée où il a appris qu’il y avait encore des personnes atteintes dans son établissement. Cette journée-là, il avait les yeux comme le chevreuil qui vient de recevoir le phare d’une voiture en plein milieu du front. C’est là que je me suis dit que c’était vrai et qu’il était en plein dedans. Mais cela a quand même passé vite. Il n’est pas resté là-dedans. Et il me racontait qu’il y avait des gens qui étaient isolés complètement. C’était triste quand même. Ça l’atteignait. »
De plus, l’aspect imprévisible de la nature même d’une crise fait que ce que l’on croit connaître s’applique tant bien que mal à ce que l’on vit maintenant. Cela demeure vrai même pour Isabelle Dumont, professeure à l’école de travail social de l’UQAM, qui admet sentir une grande différence entre appliquer un protocole dans une crise familiale ou un incendie et trouver la ligne de conduite pour reprendre son souffle et son assurance, au milieu d’une épidémie.
Cette travailleuse sociale admet avoir dû chercher ses repères, lorsqu’elle s’est impliquée dans un CHSLD : « Je n’avais jamais rien vu de pareil. On vit cela tout le monde ensemble, d’une certaine façon. On voit même, durant les conférences de presse quotidiennes, que tout peut changer assez rapidement, d’une semaine à l’autre ou même d’une journée à l’autre. »
Le tout se déroule dans une ambiance de retournement brutal depuis celle, pas si lointaine, où la croissance économique, couplée avec la pénurie de talents, poussait les employeurs à se montrer prompts au compromis. Mais Joseph a l’impression que, pour le moment, son conjoint côtoie surtout des gestionnaires aussi dépassés que leurs employés, et donc peu enclins à prendre du temps pour se mettre à l’écoute des contraintes de chacun ou à se montrer attentifs à leurs moments de doutes : « Je ne sais pas et je peux me tromper, mais je crois que même les employeurs, les gestionnaires immédiats, sont tellement débordés, tout le monde est tellement débordé, que cette question de la reconnaissance n’est pas une valeur qui se retrouve au sommet des préoccupations. Les gens, tous les travailleurs, sont en mode survie. Je crois que cela est beaucoup comme ça dans les CHSLD. »
Un silence, toujours d’or, à l’ère du Bitcoin?
L’événement est d’autant plus difficile à gérer dans les chaumières que ni les personnes en première ligne ni celles qui les accompagnent ne sont formées pour obéir, sans se poser de questions. Et l’information officielle ne parvient pas toujours à faciliter la transition de l’angoisse à l’action, du moins pas pour Joseph qui manifeste ouvertement sa colère envers les médias : « Je suis écœuré du travail journalistique en général où je ne sens pas que l’on essaie de nourrir les gens. Je sens que l’on essaie de leur faire peur. Je vois beaucoup de désinformation aussi. »
Le tout se déroule dans un contexte où il faut redorer de toute urgence l’image des métiers où la perte des partenaires a déjà un effet critique. Plusieurs initiatives sont alors instaurées pour museler l’insatisfaction qui pourrait créer, elle aussi, un effet contagieux. Le durcissement et la multiplication des chartes et des obligations sur les pratiques en ligne ou sur ce qui peut être dévoilé, à propos du travail, se sont d’ailleurs manifestés à maintes reprises, dans la réalisation de cette série d’articles.
Bien que le devoir de loyauté envers l’employeur et de secret professionnel puisse justifier quelques silences, Mircea Vultur appréhende les effets de cette accentuation des règles : « Il faut vraiment avoir un management plus ouvert et individualisé. Parce que ce ne sont pas toutes les personnes qui réagissent de la même façon dans les situations de crise. La censure pourrait avoir des effets pervers sur la santé mentale du personnel. ». Cette réflexion abonde d’ailleurs dans le sens des experts qui constatent qu’en ce moment, les réseaux sociaux jouent un rôle de premier plan dans les modes de soutien entre collègues et entre proches.
Les débats à l’ordre du jour
Ce silence peut même devenir un élément de plus pour compliquer les négociations, une fois rendu à la maison, et ce, surtout lorsque des partenaires se sentent menacés dans leur choix de se dévouer principalement, pour une durée indéfinie, à une cause externe à la famille. Pour un partenaire qui se bute aux silences de son héros du quotidien, la nuance ne coule pas toujours de source entre le refus de prendre en considération les demandes du conjoint et ce qui relève du manque de flexibilité de son employeur :
« Je crois que la tension est là lorsqu’on a l’impression que l’autre ne comprend pas ou n’est pas réceptif à ce que l’on essaie de partager. Parfois, lorsque l’autre personne ne semble pas réceptive, ce n’est pas parce que l’autre ne veut pas s’ajuster à nos besoins, mais c’est souvent parce qu’elle ne peut pas acquiescer parce que son travail ne le lui permettra pas. Je pense que c’est de là que viennent beaucoup de tensions et les conversations conflictuelles : lorsque nous n’arrivons pas à trouver une entente qui conviendra à tout le monde. » Nafissa Ismail, experte en gestion du stress de l’Université d’Ottawa
Mais toutes les querelles de ménage ne peuvent pas être mises sur le dos des obligations professionnelles. Et Isabelle Dumont rapporte qu’elle n’a jamais eu autant de consultations pour des problématiques de couple, même si, de son propre aveu, les consultations en téléconférence ne sont peut-être pas les situations idéales pour dénouer ce genre de conflit. Elle remarque aussi que la nature des frictions a changé : ainsi, proximité aidant, les problématiques d’infidélité ne sont maintenant presque plus abordées sur le divan. Par contre, en espace clos, les couples ont plus de difficulté à trouver un espace neutre pour discuter.
Et les couples où l’un des partenaires a l’occasion de se consacrer à d’autres causes ne sont pas forcément épargnés par ce phénomène, ajoute cette travailleuse sociale, puisque, pendant que l’un des partenaires quitte le nid, l’autre en reste au même point. Dans certains cas, le foyer peut même devenir plus redouté que les milieux de travail dits « à risque » : « On peut parler, dans certains couples, de celui qui est le poursuivant et de celui qui est le fuyant. Donc, lorsqu’un a besoin de se retirer, mais l’autre va continuer à lui demander comment il va et comment on peut faire pour régler la situation. Et plus on fait ça, plus l’autre se retire émotionnellement, plus il va tendre à aller dans sa chambre et claquer la porte. C’est quelque chose que l’on remarque assez souvent dans un couple. Mais là, ce qui arrive, c’est que l’on n’a pas l’espace pour se retirer. Et c’est là que les conflits, voire la violence, peuvent apparaître. S’il y a des conflits, que la personne va au front, qu’elle revient le soir et que l’on n’en parle pas, le couple se retrouve ensemble …mais la problématique va réapparaître. »
Une question de dynamique
De telles situations, il est vrai, sont propices à tout monter en épingle et constituent des facteurs aggravants pour un couple en péril. Mais Isabelle Dumont perçoit davantage les contraintes professionnelles du moment comme un ajout à un historique de couple plus compliqué plutôt que comme un élément unique pouvant faire tout basculer : « Si mon travail posait problème dans le couple avant même que la pandémie commence, maintenant, j’ajoute la pandémie aux impacts et aux répercussions. Cela va exacerber ce qui était déjà présent. Il se pourrait alors que ce soit encore plus difficile pour ce couple. »
Les partenaires ayant chacun un fort besoin d’indépendance ou n’ayant pas eu le temps ou le tempérament pour bâtir une relation basée sur l’entraide s’en trouvent particulièrement éprouvés. Inversement, ceux qui croient sincèrement à la pertinence de céder un peu de leur espace et de leurs revendications pour laisser plus de place à l’autre, partent avec une longueur d’avance dans leur adaptation à la situation, selon Mircea Vultur : « Je pense que dans les couples plus fusionnels, il y a une dimension plus sacrificielle, et si un des partenaires se sacrifie pour les autres, cela sera plus cohérent avec quelque chose qu’il a déjà en lui. L’individualisme n’est pas le trait de personnalité qui est le plus adapté à la résistance de groupe. »
Pourtant, Isabelle Dumont soutient que les couples habitués de fonctionner à l’unisson en toute circonstance, même s’ils parviennent mieux à éviter les prises de bec quotidiennes, ne sont pas épargnés pour autant : « Donc, si notre tendance, avant la pandémie, était de passer tout notre temps ensemble, il se peut que le changement soit moins grand. Mais si une personne va au front, il se pourrait que l’autre se retrouve seul avec des peurs irréalistes, dont celle de perdre la personne. Parce que dans un couple fusionnel, d’après ce que rapportent les écrits, le soi peut devenir effacé. »
À deux… pas juste pour le pire!
Cela explique en partie pourquoi, lorsqu’elle tente d’aider des couples à dépasser les rancœurs causées par des périodes troubles, Isabelle Dumont les pousse à dépasser le stade de l’évocation des émotions : elle les incite à aller chercher les besoins qui se cachent derrière. Car, d’après ses observations, ce sont souvent ces besoins non répondus qui se trouvent à la source de l’amertume : « Plus la communication est claire et ouverte, plus on se retrouve dans une ambiance sécuritaire, ce qui n’est pas toujours évident. Je pense par exemple à la personne qui passe sa journée sur le terrain et en revient en disant qu’elle est fatiguée. Elle n’a pas nécessairement besoin de s’épancher là-dedans. Peut-être que son conjoint va accueillir cela, mais ne posera pas nécessairement un geste en ce sens. Donc, c’est vraiment la capacité de la personne qui revient d’exprimer son besoin. Il faut que la personne soit capable de dire ‟Je suis fatiguée et j’ai besoin de… ”.
Mais pour en revenir à une écoute de reconnaissance, il faut parvenir à en revenir aux raisons qui ont fait que l’on a choisi l’autre et l’équilibre que le couple a recherché jusqu’ici, dans la force des différences. Malgré les irritants, Isabelle Dumont croit qu’il demeure possible de rechercher activement des moyens de se compléter, plutôt que de se laisser aller à une dynamique d’opposition : « Mais il y a aussi le facteur individuel : il faut se respecter dans ce que l’on est : si l’on est de nature un peu plus pessimiste, on peut quand même faire avec. Il y a quand même des points positifs : je parlais de complémentarité. Il y a quand même des aspects positifs à admettre que l’on est peut-être un peu plus prudente relativement à ce qui se passe. Si l’autre s’en va sur le terrain, je peux quand même davantage voir tous les risques et les difficultés que cela comporte. Je peux alors quand même nourrir utilement la discussion. Si mon conjoint est très optimiste et ne voit pas vraiment cela, il va peut-être m’aider à garder une note d’espoir. Il faut jouer là-dessus aussi. »
Cette capacité d’établir un dialogue sincère contribue aussi à passer plus harmonieusement à l’étape suivante où l’on établira un plan de match en commun. Selon Isabelle Dumont, ce qui apparaissait comme une objection peut alors être réinterprété comme un besoin qui n’attend qu’un déclic pour passer en mode solution :
« Il faut voir comment les besoins de chaque membre de la famille peuvent être comblés, même si je prends la décision d’aller au front. Ça pourrait être ‟Si tu n’es pas rassuré, je peux t’appeler sur l’heure du midi.” » Isabelle Dumont, travailleuse sociale et enseignante à l’UQAM
La simple possibilité de verbaliser ses craintes a aussi permis à Isabelle Dumont de faire passer les siennes d’un mode envahissant et émotif à une évaluation plus rationnelle des risques qui l’attendaient, dans le CHSLD : « Par exemple, si je parle avec mon conjoint de la préposée aux bénéficiaires de 30 ans qui est décédée récemment, je parle d’un article parmi beaucoup d’autres articles. C’est de s’en remettre à la Direction de la santé publique. On sait que 97 % des gens qui ont des complications graves de la COVID au point d’en décéder ont 70 ans et plus. Donc, c’est une pensée plus réaliste qu’il faut nourrir. C’est sûr qu’il est parfois difficile d’exposer nos craintes, mais je pense que lorsqu’on se sent accueilli par l’autre, c’est possible de le faire. »
Lorsque les héros sont fatigués
Aux yeux de Nafissa Ismail, le foyer n’est cependant pas seulement le lieu où l’on se parle et se raisonne, mais aussi le lieu où l’on décroche. Et il est toujours plus facile de le faire si ailleurs qu’au boulot, une autre vie suit son cours, et si possible avec ses gazouillis de rires printaniers de temps en temps : « Souvent, lorsqu’on est seul, on revient du travail et on est seul à la maison. On dirait que l’on n’a pas vraiment cette coupure qui nous oblige à dire ‟Ça, c’était le travail. Maintenant, c’est la maison. J’ai besoin de faire cette distinction.”. Parce que si on continue à amener le stress du travail à la maison, on ne dort pas bien et on interagit moins bien avec les gens autour de soi. On se sent de moins en moins bien avec soi-même aussi. Et là, la santé mentale va être vraiment affectée. »
C’est sans doute ce qui explique que pour Joseph, se mettre à l’écoute de l’homme qu’il aime a signifié, souvent, mettre la pédale douce sur sa curiosité : « Je ne dirais pas que c’est devenu tabou, mais je dirais qu’il y a des choses dont il n’a pas parlé, parce que lorsque tu arrives chez toi et que tu as ta journée de travail dans le corps, tu n’as pas nécessairement envie de ressasser tout ça. »
Voilà pourquoi Nafissa Ismail rappelle que se garder du temps pour se dorloter un peu est un principe d’hygiène de vie et de santé du couple qui ne se démode pas, en période de crise, même s’il faut parfois un peu plus d’ingéniosité pour oublier le travail et s’éclipser des enfants qui courent tout autour : « Il demeure important que dans une situation comme celle-là, qui est stressante, si on est capable de prendre ne serait-ce que quelques minutes pour se détendre ou passer un peu de temps ensemble, ça fait déjà une différence. C’est sûr que l’on ne parle pas ici de prendre une grosse journée pour partir en spa. On s’ajuste à la situation et on y va avec ce que l’on peut, même si ces moments privilégiés sont moins réguliers et moins longs. »
L’angoisse s’apprivoise, à l’usure
Bien sûr, le stress peut parfois contrevenir à l’atteinte d’un état de zénitude. Mais le stress n’affecte pas tout le monde de la même manière et il vaut la peine de s’accrocher aux aspects de bien-être auxquels on peut encore accéder. Ainsi si l’impact du stress sur la libido a très mauvaise réputation, Joseph n’a pas senti de réelle différence à ce niveau.
Il se souvient que lui et son conjoint se sont remis plus vite que d’autres du stress initial, en partie par tempérament, mais aussi parce que la COVID-19 n’est pas arrivée dans sa vie du jour au lendemain, comme ce fut le cas pour la plupart des Québécois : « Je me souviens seulement qu’il m’a dit qu’il était passé d’une réunion par jour à deux réunions par jour. Ça, c’est certain. Et il y avait beaucoup plus de discussions autour de cela et beaucoup plus de mesures de prévention et de sécurité. ». Avec le temps, Joseph a aussi vu son conjoint ajuster ses mesures de protection pour lui-même, son partenaire et ses bénéficiaires : « Pendant une certaine période, il prenait même le taxi pour aller travailler, afin d’être moins dans les transports publics pour ne pas prendre le risque de contaminer les patients. » se souvient-il.
Parmi les possibilités qui aident à passer à travers, Isabelle Dumont a aussi découvert un milieu de travail où, entre les drames, se glissent souvent quelques bouffées de rires ou des gestes de compassion, qui finissent par créer un attachement presque « sécurisant », dans ce milieu difficile : « La personne qui faisait la formation des soins disait que ce qui aidait beaucoup, c’était l’esprit d’équipe. Je l’ai vu tout de suite. Et je parlais d’humour : les blagues se faisaient aussi entre les gens. Il y avait donc quand même des moments, pas toujours, ou c’était un peu plus léger, dans la façon de se parler. La façon de se respecter aussi est importante. L’intégrité de chaque personne également. Parfois, on perd cela de vue, mais c’est très relationnel. Ça passe beaucoup dans les regards et les moments de silence. »
Ainsi, les collègues parviennent à s’assurer ensemble qu’ils ont quelque chose de plus fort que le virus qui les lie. De même, dans la vie privée, le fait d’avoir traversé des vertes et des pas mûres peut aider à relativiser les choses et à puiser la conviction que les événements extérieurs ne parviendront pas à dissoudre les liens, comme ceux qui unissent Joseph et son partenaire : « Il y a eu la maladie qui a été présente au début de la relation et où j’ai dû le soutenir beaucoup. Comparé à ça, traverser ce que l’on vit en ce moment me semble de la petite bière. »
Mais avant d’en arriver là, il a fallu dompter les premières angoisses, au travail et dans le couple. Pour s’attarder aux effets du choix d’aller au front sur le couple, commencez par la première partie, intitulée Négocier, avant d’aller au front.
Si l’enjeu est davantage de comprendre comment faire équipe derrière la personne qui va au front, lisez la dernière partie, intitulée Tous unis contre l’adversité.