Mobiliser le groupe : avant, pendant, après

Comment et pourquoi cerner ses besoins de Team Building et de consolidation

Après réflexion….

Mais si le gestionnaire peut savoir ce qu’il veut, et exiger la présence de ses employés, ceux-ci peuvent se sentir moins concernés par les objectifs que leur patron, ou encore ne pas croire en l’efficacité des moyens proposés pour les atteindre. Et les approches les plus efficaces avec eux peuvent varier selon les tempéraments et les générations: « Cela met un peu de glamour autour de l’image de l’entreprise, parce que souvent, aussi, il y a beaucoup de photos. Alors on peut dire ‟On est une équipe et c’est super”. Mais je crois que dans la vingtaine, ce genre d’activités à plus d’impact que chez les gens qui vieillissent, parce que les responsabilités ne sont plus les mêmes. Les priorités ne sont plus mises à la même place. Un homme à qui j’ai parlé était déçu : il avait de jeunes enfants, il n’avait pas que cela à faire, une journée à aller jouer, alors que ceux qui étaient dans la vingtaine se sentent plus libres de leurs actions. Ton énergie et ton temps à investir ne sont pas les mêmes. » conclut Janick Raymond, qui insiste aussi sur le fait que, pour les employés tout comme leur supérieur, avoir l’impression de devoir investir du temps ou de déployer de l’énergie en pure perte peut devenir une source de frustration.

Tous les experts rencontrés s’entendent d’ailleurs sur le fait qu’une bonne entente avec le patron ne suffit pas et qu’il existe des limites à ce que peut faire un animateur ou un conférencier pour forcer cette implication : « Moi, je vais leur faire vivre des expériences, les gens vont réfléchir sur l’expérience et ils vont identifier les actions et les comportements qu’ils doivent pratiquer pour continuer à s’améliorer en équipe. Cela vient d’eux. La prochaine étape, c’est qu’ils sont responsables de le faire lorsque je suis parti. S’ils ne font rien après la conférence ou les sessions de Team Building, ils ont perdu leur temps. L’autre chose, c’est durant l’activité : dès le début, je responsabilise les participants : ils ne sont pas là juste pour écouter. S’ils ne sont pas prêts à partager, prêts à être engagés, cela va être une perte de temps pour eux et même pour leurs collègues qui n’auront pas eu le bénéfice d’apprendre d’eux autres. » affirme Marc Merulla. Pour cette raison, le gestionnaire a tout avantage à se donner tous les moyens possibles pour impliquer ses employés dès le départ. Pour Colette Côté, cette responsabilité, à travers laquelle elle accompagne les employeurs, suppose d’identifier les attentes de l’équipe, mais aussi de mettre en marche une stratégie de communication avant l’activité, pour que l’enthousiasme soit au rendez-vous lors du Jour J :

« Je me souviens d’avoir fait une identification des besoins pour la gestion du changement. On a identifié les leaders plus positifs et les leaders plus négatifs, ceux qui sont actifs et ceux qui sont passifs. Et là on peut aller voir quelles sont les stratégies pour aller les chercher et on établit la stratégie de communication en fonction de cela. Ce ne seront pas nécessairement les mêmes actions ni les mêmes joueurs pour les deux. Il faut aller identifier nos alliés, et les gestionnaires connaissent habituellement très bien leurs équipes. Ils savent qui vont être les leaders positifs et dépendamment de la stratégie utilisée, ce sont les leaders qui vont aller contaminer les autres aussi. Il y a toutes ces réflexions que l’on doit faire. Ce n’est pas nécessairement moi qui vais rencontrer tout le monde pour leur expliquer pourquoi on fait cela. »  – Colette Côté

Dans les meilleurs des cas, il arrive que l’équipe même fasse part de son désir d’avoir une activité et qu’elle soit entendue, mais, remarque Janick Raymond, dans de nombreuses situations « Le patron ne communique pas nécessairement ses attentes et les employés parlent de leur insatisfaction entre eux; mais quand ils arrivent devant le patron, ils n’osent pas, à cause de la hiérarchie. ». Afin de dépasser cette contrainte, plusieurs moyens peuvent être utilisés comme des groupes de discussion, des sondages ou des tests psychométriques. Pourtant, chacun de ces outils a ses limites. Ainsi, l’entrevue individuelle, qui offre une somme d’information considérable à un consultant, peut s’avérer coûteuse pour un grand groupe et n’est pas toujours à la portée des bourses des PME. Un sondage, surtout en ligne, risque d’obtenir des réponses moins réfléchies ou encore, croit Marc Merulla, créer de fausses attentes, si les activités ne correspondent pas à leurs réponses. Ce dernier a également remarqué que même les tests psychométriques, pourtant conçus pour bien identifier les profils de personnalité, s’ils ne sont pas menés d’une main de maître, peuvent mener à plus de fermeture que d’ouverture : « Parfois, les personnes finissent par se cacher derrière ces tests. Ils deviennent presque une caricature de leurs résultats au lieu de devenir plus ouverts à travailler ce qui ne va pas. Ils vont lire leur résultat et se dire ‟Ce type de personnalité devrait avoir de la difficulté avec ceci et avec cela”, ou ‟Vous êtes vraiment bons dans cela et cela”, sans vraiment prendre le temps de voir comment ils pourraient s’améliorer. Cela dépend toujours de la façon dont ils sont encadrés. » Le choix de la façon d’évaluer et d’utiliser les résultats réclame donc, ici aussi, une expertise.

Selon Colette Côté, le meilleur choix n’est pas nécessairement celui qui élimine toute forme de risque. Au contraire, le fait de sortir de sa zone de confort, de faire appel à d’autres lieux, d’autres pratiques d’animation, peut aider à susciter le changement : « Déstabiliser les gens, c’est très intéressant, surtout quand on travaille avec des gens qui sont entrés dans leurs croyances depuis plusieurs années. De les déstabiliser en expérimentant quelque chose, ça ouvre les esprits parfois. »  Par contre, Marc Merulla insiste sur le fait que cette intention de surprendre ou d’amener son équipe à se dépasser ne justifie pas que l’on place ses employés en position de se sentir contraints d’affronter leurs peurs ou leurs limites, sur le plan physique ou psychologique : « Pourquoi pousserait-on notre monde à faire de l’escalade ou ceci ou cela quand ils ne sont pas confortables à le faire? Pour leur prouver qu’ils peuvent aller plus loin qu’ils le pensent? Ce n’est pas notre travail. Les gens arrivent avec leur histoire: il y en a qui ont surmonté le cancer, j’en ai qui m’ont raconté qu’ils ont perdu un enfant. Ce n’est pas nécessairement le côté physique qui nous rend plus forts. Il y a trop de fois où les gens pensent que si on ne se pose pas physiquement, on ne peut pas comprendre quelque chose, on ne peut pas aller plus loin. » Mais les plus grandes frustrations mentionnées par les participants rencontrés en entrevue par Janick Raymond portaient moins sur la qualité de l’encadrement que sur l’incompréhension des objectifs ayant motivé les choix d’activités :

« Donc le problème ce n’est pas du côté de la personne qui fait la demande d’activité ou de celle qui la fournit, mais c’est la compréhension des employés de la raison pour laquelle ils sont là. Le fait que les attentes de l’entreprise ne soient pas toujours communiquées correctement peut causer des frictions et des tensions : c’est encore un problème de communication. » – Janick Raymond

Il fut même assez fréquent que des participants gardent des souvenirs plus vifs de la nourriture lors de l’activité que des thèmes à explorer. Marc Merulla se souvient aussi d’expériences lui ayant révélé à quel point la méconnaissance des objectifs pouvait mener à des situations ingérables : « Les gens pensaient que j’étais là parce qu’on allait annoncer des coupures. Je m’en souviens encore, après 15 ans! Mais cela m’a appris que l’on ne peut pas tenir pour acquis que les gens sauront que c’est du Team Building ou encore que ce sera positif. »

Pourtant, ce dernier croit que le simple fait de discuter avec les membres de l’équipe au préalable peut contribuer à apaiser plusieurs réticences et aider à mieux comprendre les objectifs. Cette marque d’attention envers les appréhensions possibles de l’équipe contribue aussi à prévenir les situations inconfortables et à trouver des solutions afin d’éviter que les personnes ayant un profil particulier se sentent exclues. Alors, dans ce contexte, quelle place peut-on encore laisser à la surprise et au dépaysement? « Ils ne sont pas obligés de tout savoir exactement ce qui va se passer, chaque demi-heure de la journée. On peut leur expliquer en gros, ce que l’on va faire, et, surtout, leur expliquer les objectifs. On peut leur expliquer ce que l’on attend d’eux pendant cette journée-là. On peut leur dire aussi ‟ Il y a des choses que vous allez devoir faire, vous ne les saurez pas d’avance, et c’est volontaire, pour que l’on ait votre réaction, à chaud, comme cela.” Comme ça, on peut être capable de les préparer à faire preuve d’ouverture d’esprit sans leur dire tout ce qui va leur arriver. » répond Colette Côté.

Pour savoir par où commencer, voir la partie 1 de Les besoins d’abord, la consolidation ensuite: Un projet qui mérite réflexion ou, pour en savoir plus sur les experts, voir la partie 3: Du plaisir et des limites

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Marie-Hélène Proulx
Fondatrice en 2017 de Portail Immersion, Marie-Hélène est avant tout une passionnée des activités et des loisirs immersifs avec une très grande expérience dans la production de répertoire pour les loisirs et la jeunesse.